Les Echos - Alain ATALLAH TRINITY Gestion Privée

Les Echos – le 28 avril 2021

Crédit: Faut-il utiliser son cash pour rembourser un crédit immobilier?

Interview d’Alain ATALLAH, Président du Groupe TRINITY, par Anne-Sophie VION, Les Echos.

 

Les confinements ont permis aux Français d’épargner. Doivent-ils utiliser ces liquidités pour rembourser par anticipation un crédit immobilier ou placer cette épargne ? Des calculs s’imposent en fonction des possibilités financières, des projets et de l’imposition de chacun.

 

Comment choisir entre « rembourser au plus vite son prêt » et « investir son argent » ? (iStock)

Vous avez accumulé dans cette période de crise sanitaire, une épargne Covid conséquente . La question se pose du meilleur investissement possible avec ces économies. Les propriétaires d’un bien immobilier financé à crédit peuvent se demander légitimement s’il est pertinent de procéder au remboursement anticipé de celui-ci.

Comment choisir entre « rembourser au plus vite son prêt » et « investir son argent » ? Quels sont les critères à étudier ? Ce qu’il faut savoir.

 

Pouvoir d’achat immédiat


Avec des taux moyens de crédits immobiliers qui sont au plus bas est-il vraiment avisé de rembourser son crédit par anticipation ? Quel que soit le montant remboursé (il faut étudier l’option d’un remboursement partiel), vous ferez baisser le capital restant dû. Les intérêts et l’assurance, exprimés en pourcentage de capital, seront alors recalculés sur ce nouveau montant. Dès lors, vous allez gagner sur le coût total du crédit.

La banque ne peut pas s’opposer à un remboursement anticipé, sauf s’il s’agit d’un remboursement partiel d’un montant inférieur ou égal à 10 % du montant initial du prêt. « Attention ! l’établissement peut ajouter des conditions restrictives en augmentant ce montant minimum, mais aussi en réservant l’absence d’indemnité de remboursement anticipé aux rachats effectués après un certain nombre d’années de crédit, souvent après 5 ou 7 ans, ou aux cas de revente du bien » , avertit Sandrine Allonier, directrice des études chez Vousfinancer.

 

Si le crédit porte sur votre résidence principale, il faut s’interroger sur le but visé par l’opération. Procéder à un remboursement permet de s’offrir un peu « d’oxygène » lorsque le prêt se révèle à l’usage trop lourd à porter. Vous pouvez opter pour un allégement de vos mensualités, qui vous redonnera du pouvoir d’achat immédiat tout en maintenant la durée initiale du prêt. Cela peut correspondre à la nécessité de financer les études supérieures de vos enfants ou au souhait d’acheter un autre bien immobilier en minorant ainsi votre taux d’endettement actuel.

Il est aussi possible d’utiliser cette somme pour réduire la durée du prêt, ce qui permet de diminuer encore davantage son coût total. De cette manière, vous pourrez, par exemple, faire coïncider la fin du prêt avec le passage à la retraite, où l’on subit une chute de ses revenus. Vous pouvez aussi choisir une solution intermédiaire en mixant réduction des mensualités et de la durée.

 

Pénalités à prévoir


Vous devrez, au préalable, décortiquer les conditions de votre prêt, car les modalités du remboursement anticipé sont variables d’un contrat de crédit à l’autre. Autre élément à prendre en considération : le montant des indemnités de remboursement anticipé (IRA) dont vous devrez vous acquitter. Il est d’autant plus important que vous serez en début de prêt. Sauf si vous aviez pu négocier leur suppression à la souscription du crédit.

Ces pénalités ne peuvent excéder la valeur d’un semestre d’intérêt sur le capital remboursé au taux moyen du prêt, sans pouvoir dépasser 3 % du capital restant dû avant le remboursement. « Avec des taux de crédit extrêmement bas depuis cinq ans, les banques veulent moins négocier l’absence d’IRA, car celles-ci sont devenues en réalité faibles. Ce n’est plus un frein au remboursement partiel » , estime Sandrine Allonier.

 

 

Il est conseillé de prendre rendez-vous avec votre chargé de compte pour lui demander à combien s’élèveraient vos frais et des simulations sur l’impact qu’un remboursement anticipé partiel ou total aurait sur le coût restant de votre prêt.

Le remboursement de votre crédit doit être aussi apprécié au regard du rendement de votre épargne sur la durée restante du prêt. Vous devrez comparer le coût restant de votre crédit, assurance incluse, avec le rendement que pourrait vous procurer un investissement réalisé avec la somme que vous destiniez au remboursement. Le rendement de celui-ci doit bien sûr être considéré en net d’impôts et de prélèvement sociaux.

 

Alternatives peu rémunératrices


Or si les taux du crédit immobilier sont au plancher, le rendement des placements favoris des ménages pour loger leurs liquidités, comme le Livret A, est lui aussi très faible (0,5 % net d’impôts). Même bémol s’agissant des fonds en euros de l’assurance-vie. Leur taux moyen, brut d’impôt, devrait passer sous la barre des 1 % en 2021.

Abstraction faite d’autres considérations, si le coût réel de votre crédit (c’est-à-dire le taux du crédit et le taux de l’assurance-emprunteur) est supérieur au rendement net de votre épargne, vous avez alors intérêt à le rembourser par anticipation.

 

 » Il est plus intéressant aujourd’hui de placer son épargne dans un contrat d’assurance-vie multisupport de qualité, plus liquide que la pierre et sans les risques liés à l’investissement locatif « 

Alain ATALLAH

 

Bien sûr, vous pouvez aussi envisager d’investir sur des placements plus rémunérateurs, comme les actions, mais aussi plus risqués. Pour Alain Atallah, président de Trinity Gestion Privée, il est même « plus intéressant aujourd’hui de placer son épargne dans un contrat d’assurance-vie multisupport de qualité, plus liquide que la pierre et sans les risques liés à l’investissement locatif » .

Dernier point : avant d’opter pour le remboursement du prêt, il faut garder en tête que celui-ci permet de profiter d’une assurance décès invalidité. Ce qui dans le cas, par exemple, d’un achat en couple avec une assurance à 100 % sur chaque tête signifie qu’au décès de l’un des deux co-emprunteurs, l’assurance finance la totalité du capital restant dû. « Aujourd’hui, le meilleur moyen de sécuriser sa famille, c’est de s’endetter », résume Alain Atallah.

 

L’impact de la fiscalité


La fiscalité est un élément clé à analyser avant de prendre la décision de rembourser son prêt. Car l’endettement permet parfois d’alléger la facture. C’est le cas si vous avez contracté un crédit pour réaliser un investissement locatif (en direct ou par l’intermédiaire de SCPI, par exemple). Vous pouvez, si vous êtes au régime réel, déduire les intérêts d’emprunt de vos revenus fonciers.

 

« Contrairement au prêt contracté pour l’achat de sa résidence principale, pour un investissement locatif, je déconseille toujours le remboursement anticipé »

Alain ATALLAH

 

« Contrairement au prêt contracté pour l’achat de sa résidence principale, pour un investissement locatif, je déconseille toujours le remboursement anticipé », souligne Alain Atallah. Vous devrez là aussi sortir votre calculette pour chiffrer en moyenne le gain de cette déductibilité fiscale. Il pourrait être plus profitable de garder votre prêt pour déduire les intérêts d’emprunt et donc minorer votre imposition.

Par ailleurs, le prêt immobilier permet de réduire l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Le calcul de celui-ci se porte sur le patrimoine net, c’est-à-dire emprunt déduit. Il peut donc être tout à fait pertinent de conserver son financement pour limiter ou s’exonérer de l’IFI.

 

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Sources: LesEchos.fr